Chers amis,
Notre réunion de rentrée, la 7e, s'est tenue pour la première
fois à Tolbiac où nous nous retrouverons tout au long de
l'année. En effet, J.-P. Vallat, que nous remercions très
sincèrement pour cette précieuse aide logistique, met désormais
une salle de séminaire à notre disposition, un vendredi
par mois.
Nous étions moins nombreux que la dernière fois, 12 participants,
mais plusieurs d'entre nous s'étaient excusés, période
d'inscription et reprise des cours oblige. Il faut aussi rappeler que,
cette année, certains sont rentrés en Tunisie où
ils ont obtenu des postes à l'INP ou à l'université
: Slah Selmi et Zakia Loum.
Nous avons commencé par rappeler quelques informations qui se trouvent
sur le site comme les soutenances de Nicolas Schmalz et Catherine Fourmont
les 22 nov. et 13 déc. et l'avancement du projet de numérisation
du CIL, VIII. A ce propos, Mohammed Ben Abbes a renouvelé son appel
à participation que nous avions déjà reçu
par mail et nous avons proposé que toutes les personnes intéressées
se retrouvent pour une séance de travail afin de définir
ensemble les modalités de la numérisation des images, de
leur traitement et de leur stockage.
Leïla Barkati, inscrite sous la direction de J.-P. Vallat et ATER
à Paris VII, nous a présenté le séminaire
animé par son directeur et rappelé les dates des séances
qui concerneront l'Afrique cette année : les lundis 5 et 19 janvier
et le lundi 19 février où parleront V. Brouquier-Reddé,
E. Lenoir et M. Sebaï. Vous retrouverez ces dates dans la rubrique
Agenda.
La réunion s'est ensuite déroulée en trois temps
: la présentation de nouvelles publications, l'annonce des dates
de diverses rencontres scientifiques et l'exposé de Raya Ben Guiza
sur "les décans Egyptiens et leur réception dans le
monde phénicien et punique".
1- Bibliographie
Raya a présenté La naissance du monothéisme,
d'André Lemaire et La marine carthaginoise, de Abdelhamid
Barkaoui. Hédi a signalé la parution de deux ouvrages sur
la civilisation punique : La présence punique en pays numides
d'Alya Ben Younès-Krandel et Recherches sur l'architecture funéraire
punique du Cap Bon de Mounir Fantar. Concernant la période
romaine, un seul ouvrage a été présenté par
Sophie : Itinéraires de Saintes à Dougga. Hommages à
Louis Maurin. Vous trouverez un compte-rendu de ces ouvrages récents
et leurs références précises dans la rubrique Chroniques.
Il faut aussi signaler la parution des Actes du 9e Colloque sur l'histoire
et l'archéologie de l'Afrique du Nord qui s'était tenu
à Tabarka, en mai 2001. L'ouvrage n'était pas encore disponible
au moment de notre réunion, mais il serait intéressant que,
parmi ceux qui se le procureront ou se le sont déjà procuré,
quelqu'un en fasse un compte-rendu pour Africa Antiqua.
Enfin une publication concernant l'Afrique a été annoncée
: les actes des deux premières journées d'études
de la Société d'Etudes du Maghreb Protohistorique Antique
et Médiéval (SEMPAM) qui s'étaient tenues en 2001
et en 2002 à Ulm et à Aix (où Mohédine Chaouali
et Raya Ben Guiza avaient chacun présenté une communication)
vont être prochainement publiés ensemble dans un fascicule
d'Antiquités Africaines.
2- Colloques et séminaires
Les 3e journées d'études de la SEMPAM se sont
tenues les 10 et 11 octobre 2003 au musée d'Aquitaine de Bordeaux,
au moment de l'ouverture de l'exposition Saint Augustin, une mémoire
d'Algérie (jusqu'au 4 janv. 2004 avec, tous les mardi soirs, une
conférence du Pr. P. Cambronne, spécialiste de l'évêque).
Conçues en relation avec cette manifestation, le thème de
ces journées était Saint Augustin : la Numidie et la
société de son temps. En attendant leur publication
annoncée à l'Institut Ausonius fin 2004, Sophie nous a fait
un compte-rendu des communications que vous trouverez en Annexe 1 et a
ramené le catalogue de l'exposition présenté par
Mohammed (Chroniques).
Plusieurs dates de manifestations scientifiques sont à
retenir, elles figurent également dans l'Agenda
:
- 4-5 déc. 2003, à Sienne : colloque international sur Les
paysages antiques du Maghreb : Maroc et Libye.
- 10-14 mars 2004, à Siliana et à Tunis : colloque organisé
par A. Ferjaoui sur le thème de Carthage et les autochtones.
- 22-24 octobre 2004, à Paris : le Groupe de Recherche "Sanctuaires
et lieux de culte" organise un colloque sur le thème des Rites
et aménagements cultuels en Afrique pré-romaine, romaine
et chrétienne.
- 9-12 décembre 2004, à Rabat : 15e Colloque de l'Africa
Romana.
- fév.-mars 2005, à Tripoli : la SEMPAM organisera un colloque
qui traitera des Cultes et lieux de culte en Afrique, de la période
protohistorique à l'époque médiévale. Pour
proposer une communication, il faut s'adresser à S. Lancel, R.
Rebuffat ou X. Dupuis.
3 - Exposé
Pour terminer, Raya nous a présenté sa communication intitulée
"Les décans égyptiens et leur réception dans
le monde phénicien et punique", il s'agissait d'une répétition
pour le colloque La Transeuphratène à l'époque Perse.
Société, Pouvoir et Religion qui s'est tenu du 6 au 8 nevembre
2003 à l'Institut Cathloique de Paris. (Annexe 2). Beaucoup de
questions ont été posées sur ce sujet qui nous était
à tous peu familier, l'occasion d'aborder d'autres domaines de
recherche.
Cordialement,
Sophie Saint-Amans
ANNEXE 1. Résumé des communications présentées
aux 3e journées de la SEMPAM
Les deux premières communications du Vendredi 10
octobre, d'A. Michel et J. P. Caillet, se complétaient puisqu'elles
avaient toutes les deux traits aux églises paléochrétiennes.
A. Michel a rappelé la densité et précocité
de l'implantation des sièges épiscopaux en Proconsulaire,
mais aussi en Numidie : recense 167 églises sur 97 sites des 2
provinces et présente une rétrospective des principales
églises martyriales dont le principal pb est qu'elles sont mal
datées, pas de rapports de fouilles anciennes. et J.P. Caillet
s'est intéressé particulièrement aux ensembles chrétiens
de Timgad, Djémila, Announa et Madaure pour conclure aussi que
les nombreuses implantations d'églises précoces correspondent
bien aux témoignages laissés par les sources, en particulier
par Saint Augustin. La matinée s'est terminée avec la communication
de Fr. Baratte qui a dressé une typo-chronologie de la sculpture
en Numidie à la fin de l'Antiquité, en soulignant lui aussi
les difficultés soulevées par les pb. de datation.
L'après-midi, deux responsables de sites algériens ont parlé
d'Hippone, la ville de Saint Augustin : S. Dahmani et S. Ferdi ont présenté
respectivement un bilan de l'état de conservation du site d'Hippone
aujourd'hui et un itinéraire des visites pastorales de l'évêque
dans ses campagnes. Cl. Lepelley a clôt la journée en évoquant
la vision qu'avait l'évêque de sa société,
qu'il divise en deux parties. Il se définit comme africain, homo
Afer, et témoigne d'une forte identité régionale
fondée en particulier sur les héritages puniques dont il
exalte la culture, en revanche, il qualifie de barbares, Afri barbari,
les populations tribales des confins et de Maurétanie.
Les trois premières communications de la matinée du samedi
11 octobre était davantage consacrées à certains
aspects de la théologie de SA et au cheminement de son engagement
spirituel. P. Cambronne a évoqué le parallèle entre
les perversions de la chair et celle de l'esprit que Saint Augustin a
établi en construisant un jeu de miroirs entre plusieurs livres
des Confessions. A. Fraïsse a rappelé la venue à Uzalis
des reliques de Saint Etienne en analysant le récit du De miraculis
Sancti Stephani, puis en envisageant, à travers La Cité
de Dieu, l'évolution des prises de position de Saint Augustin vis-à-vis
des miracles.
Enfin, S. Lancel a conclu le colloque par des notes très intéressantes
et très instructives sur l'entourage féminin de l'évêque,
en particulier sur ses relations avec sa mère, Monique.
Sophie Saint-Amans
ANNEXE 2. Résumé de la communication de Raya ben Guiza
: "Les décans égyptiens et leur réception dans
le monde phénicien et punique"
Cet article concerne les rouleaux puniques et leur iconographie
égyptisante. Il s'agit de mieux comprendre la dimension emblématique
de ces amulettes et d'étudier plus amplement le phénomène
égyptien " des décans " qui les a inspirées.
Les pendentifs porte-amulettes et leurs rouleaux talismans ont été
découverts lors des premières fouilles des nécropoles
carthaginoises il y a plus d'un siècle. Plusieurs études
leur ont déjà été consacrées depuis,
toutes redevables à la recherche majeure de Jean Vercoutter qui
a le premier attiré l'attention des chercheurs sur la ressemblance
de leur iconographie avec celle d'autres objets égyptiens. En précurseur,
il n'a pas hésité à démontrer la filiation
de ces amulettes carthaginoises avec les décans égyptiens.
Depuis 1945, plusieurs autres rouleaux ont été découverts
sans que le rapprochement avec ceux de Carthage ne soit systématiquement
fait, jusqu'au jour où Mme Brigitte Quillard a entrepris un travail
énorme celui de rassembler en deux grands volumes l'ensemble des
bijoux carthaginois et leur a donné voix au chapitre. Son étude
met en valeur la place particulière qu'ils occupent dans la bijouterie
phénico-punique, faisant rejaillir par-là leur " typicité
" et leur valeur talismanique. Force est de constater que ces objets
se distinguent des simples ornementations et qu'on ne peut se contenter
de les traiter comme une simple production égyptisante.
Le problème de l'origine de ces documents est très délicat
à aborder, il n'en demeure pas moins que l'étude des Bijoux
permet de dégager une série de données plaidant en
faveur d'une origine carthaginoise. Après avoir démontré
l'antériorité des étuis porte-amulettes carthaginois
sur les exemplaires semblables du Proche-Orient, il est facile de rejeter
la théorie de J. M. Blázquez qui plaidait pour une origine
phénicienne. J. Leclant ne s'est quant à lui pas prononcé
sur une éventuelle origine, mais a insisté sur la parenté
iconographique avec certains rouleaux trouvés en Egypte. Certes
des modèles antérieurs aux exemplaires puniques sont connus
en Egypte, mais ils s'en distinguent tellement par leur forme et leur
iconographie, qu'une filiation directe serait audacieuse. Avec l'étude
de G. Maas-Lindemann , on admet qu'il ne s'agit pas de simples importations
et on envisage une production locale. Les Carthaginois les auraient gravés
d'après un modèle qui leur est familier, mais aussi les
auraient arrangés selon les propres attentes de leur clientèle.
En Égypte, les décans, véritables horloges stellaires
étaient supposé sinformer les morts sur le passage des heures
de la nuit, les guider et protéger contre tous les dangers dans
leur voyage vers l'au-delà. La course immuable des décans,
représentants de tous les astres dans la voûte céleste,
donnait l'assurance au Ba du défunt de rester dans un cycle invariable
et infini et par conséquent lui garantissait l'immortalité.
Les premières attestations iconographiques égyptiennes des
décans auxquelles se rattachent les figures phéniciennes
remontent à la XXIIe dynastie, avec les bracelets de Hornakht.
Ces deux bracelets ont été trouvés dans la tombe
d'Osorkon II et sont très importants pour la compréhension
des figures adoptées par les Phéniciens, car en plus des
formes habituelles des décans ils portent des inscriptions qui
éclairent sur la visée de ces objets. On y apprend que les
décans avaient un pouvoir sur le destin et qu'ils pouvaient suppléer
la douleur et la mort. Les invoquer permettait de s'assurer une garantie
contre toute épreuve.
L'iconographie des rouleaux-talismans dérive de cette tradition
décanale. Les décans y sont représentés dans
un schéma logique, mais ils sont aussi accompagnés par une
assemblée de divinités et de démons, (deux grands
chapitres en particulier sont consacrés à la déesse
Sekhmet et son émissaire le décan serpent " srw
").
Les influences de l'Égypte sur la culture phénicienne ne
sont plus à démontrer tant elles sont nombreuses. La période
" libyenne " est particulièrement sensible et riche en
documentation archéologique. Et on peut désormais compter
sur la richesse de ces images décanales pour mieux comprendre la
religion phénicienne.
Le principe des bandes roulées et enveloppées dans un tube
trouve un parallèle dans le système des décrets divins,
qui sont apparus à la fin du Nouvel Empire. Toutes ces protections
individuelles, souvent nominatives, permettaient de se prémunir
de tous les dangers et garantissaient une immunité face aux dangers
provoqués par Sekhmet ou par l'action magique. Portés au
cou du propriétaire, le papyrus est roulé et conservé
dans un étui le cachant des regards indiscrets qui peuvent lui
faire perdre son efficacité. Chronologiquement, cela correspond
parfaitement avec l'apparition des pendentifs porte-amulettes carthaginois
et leur diffusion méditerranéenne.
Au regard de cette étude, il semble possible d'affirmer que l'iconographie
de ces amulettes puniques a une origine égyptienne directe. La
production, quant à elle, fut réalisée dans des ateliers
puniques, carthaginois de surcroît, qui auraient été
en contact avec des artisans égyptiens d'abord et qui se seraient
directement inspirés de leur répertoire pour développer
un modèle propre aux attentes puniques locales. Ces modèles
sont tout à fait assimilés et ne sont pas de simples copies.
Les artisans ont compris la taxinomie et le symbolisme de ces figures
et ne se contentaient pas de les disposer selon un ordre aléatoire.
Sous réserve d'indices contraires, il semble probable que les Carthaginois
aient la paternité de ce type d'amulettes. Carthage serait le centre
de gestation, de production et de distribution de celles-ci de la fin
du VIIe jusqu'au IIIe s. av. J.-C.
Raya ben Guiza
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